Biarritz, d’un autre regard…

Biarritz, d’un autre regard…

Autant le dire d’entrée de jeu : j’ai beaucoup de mal à photographier ce que je connais déjà. J’ai l’impression de ne pas avoir le petit truc en plus qui me donne l’envie de figer tel ou tel moment ou tel paysage. Et en photo depuis tout petit c’est plutôt du paysage que j’avais dans le biberon et pas vraiment de la street-photography. J’ai donc profité dune balade post hivernale et tempétueuse pour bousculer mes habitudes. Un boitier, une focale fixe (50mm f/1. 8), et une ville, c’est tout ce dont j’avais besoin pour essayer de raconter une histoire.

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Bon avant de commencer, comme dit dans l’intro, j’ai du mal avec la photographie de rue, j’adore ça, mais je ne le maitrise pas. Je n’ai pas le talent d’un Jéremy, ou encore d’une Samantha pour rester dans la blogosphère (J’en oublie beaucoup hein, donc ne me tapez pas..ou envoyez moi un mail). J’ai beau avoir les yeux qui furètent partout, je n’ose pas. Et bon quitte à chercher à bousculer les habitudes, il me fallait une ville à la hauteur : Biarritz.

Pourquoi à la hauteur me direz vous, pour son faste ? Pour son atmosphère ? Non, tout simplement parce que Biarritz c’est une ville que je n’aime pas trop, ou plutôt que je n’arrive pas vraiment à cerner. Et je n’aime pas ne pas comprendre. Cette ville c’est une sorte d’exception qui confirme la règle, un truc a part qui ressemble à aucune notre ville de la région, même en poussant au-delà des frontières.

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Bon il y a bien son architecture belle époque, ses maisons années 30, et ses palais napoléoniens, ça encore j’aime bien mais ça ne me suffit pas à me la faire aimer. Au fond Biarritz, à mes yeux c’est un peu le Saint-Tropez de l’Atlantique. Une ville, ancien port de pêche (allez faire un tour du côté du Port-Vieux) qui ne demandait rien à personne et qui fin 19ème se transforme en « The place to be » grâce à Napoléon III.

Même Victor Hugo disait de Biarritz : « Je n’ai qu’une peur, c’est qu’il (ce village) devienne à la mode…Alors Biarritz, ce village si agreste, si rustique sera pris du mauvais appétit de l’argent ». Un devin avant l’heure le Père Victor. Car c’est malheureusement ce qu’est devenu Biarritz.

C’est un peu la ville symbole d’un faste qui n’existe plus mais qui essaye tant bien que mal de nous faire croire le contraire. Du charme de la belle époque on est passé à une réplique de l’Avenue Montaigne.

Et pour autant j’arrive encore à trouver du charme à Biarritz hors saison, ou à la sortie de l’hiver, après avoir subi les assauts dévastateurs d’une mer fâchée par un hiver capricieux. Biarritz se révèle alors frêle et fragile, tout en essayant de garder la tête haute pour quand même garder un certain standing, une certaine fierté. Après tout on est quand même au Pays Basque.

Le vendeur de glace, lui est toujours là, vantant le bon goût de ses parfums, échoppe ouverte aux quatre vents, attendant désespérément qu’un touriste égaré, définitivement pas frileux, soit pris d’une soudaine envie de sucré.

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Sur la grande plage la topologie du paysage a été légèrement modifiée. Des dignes naturelles de sable on fait leurs apparitions. Mises trop tard, ou trop tôt, en prévision de la prochaine tempête. Sur ces dunes improvisées, les couples s’enlacent, indifférents au changement, faisant comme si de rien n’était, tandis qu’un surfeur lui, guettant la vague, se remplit les poumons d’embrun, jusqu’à ne vouloir faire plus qu’un avec la mer.

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Au fond les surfeurs, les vrais, ce sont un peu les marins de notre temps. La même peur de la mer mélangée avec la même admiration, et le même amour et la même envie de s’y abandonner comme dans les bras d’une petite qu’on aurait levé un soir de bal. Lui il est là, attendant juste la bonne rencontre.

Sur la promenade, une petite vieille, assise le dos bien droit, le visage maquillé. Belle comme peuvent seulement l’être les p’tites bonnes femmes de son âge et sa classe. Elle regarde la mer, ou non, plutôt on dirait qu’elle attend quelqu’un ou quelque chose. Habillé comme pour un premier rencard, je crois même apercevoir un sourire sur son visage marqué.

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On continue, on pousse au bout de la jetée. Les vitrines sont rafistolées à grand renfort de contreplaqué. Ici, quand la mer s’énerve, vous êtes toujours perdants de quelque chose. J’ose m’imaginer le bruit sourd des vagues venant s’écraser contre les rochers ou les bâtiments tel des kamikazes ne craignant pas la peur. Le bruit a dû résonner, le ciel a dû s’assombrir annonçant une apocalypse éphémère mais meurtrière. On ne déconne pas avec les éléments.

Dans la rue qui monte, et dont le nom m’échappe, un bonhomme les deux mains sur les parapets tellement typique de Biarritz. Ceux en cailloux agglomérés qui vous écorchent les genoux quand vous êtes gamins, et qui semble être d’une lointaine inspiration végétale. Il est là, casquette vissée sur le crâne, fier comme pas deux, admirant la vue ou réfléchissant à autre chose, allez savoir…

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Toujours sur ses mêmes parapets, un piaf déambule, imperturbable. Enfin si, je sens bien que je le gêne, même de loin. Pourtant je reste, me faisant le plus discret possible, anticipant ses mouvements pour mieux le figer. Enfin…j’essaye !

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Sur le petit pont de pierre (et non de bois pour les amateurs de la chanson française), celui qui passe au dessus du bout de la Grande Plage et qui vous amène au Rocher du Basta, deux femmes nippées comme un dimanche, s’avancent en devisant. Derrière elles, la silhouette de Biarritz et du Port-vieux s’étend. Le soleil rend toutes ces silhouettes cotonneuses, diffuses, presque comme une lumière d’une chaude soirée d’été.

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Pour arriver à notre tour jusqu’au pont, on remarque les dégâts, par endroits le béton semble s’être fait avaler. La promenade a une sale gueule, une gueule de bois pas belle à voir.

On monte les quelques marches et l’autre côté de Biarritz se dévoile derrière les feuillages. En haut peu de monde. Un lecteur imperturbablement absorbé par son bouquin. Des filles hilares se fendent la gueule, heureuses d’être là, heureuses d’être ensemble tout simplement.

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Les deux femmes du pont sont là, elles aussi, continuant leur discussion, face à la mer, face au vent.

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Nous on fait marche arrière, croisant un chien complètement loufoque qui s’est trouvé les vagues et un bâton pour compagnons de jeux.

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Au fond, j’ai pris plaisir à bousculer mes habitudes, à essayer de voir, d’aborder le connu d’une autre manière. Je dirais même que j’y ai pris goût. Et puis Biarritz, au fond, j’ai beau ne pas la comprendre, ni vraiment la porter dans mon cœur, je sais au moins comment l’apprécier….en la déshabillant du regard.

 

Post-Scriptum :

Récemment dans une brocante dans le nord de la France, en Picardie, je suis tombé sur une carte postale du Rocher du Basta, avec là-aussi une femme endimanchée et son mari déambulant sur le pont de pierre qui relie le rocher à la promenade. Bien des années après (la carte semble être datée du 27 Août 1920), les habitudes biarrotes ne semblent pas vraiment avoir changé…

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Et histoire de s’imprégner un peu plus voici le texte de cette carte postale qui a voyagé :

Biarritz lundi.
Mes chers parents,
parti ce matin à 7h44 d’Hendaye, j’étais 1h après à Bayonne où j’ai trouvé ma chambre.
Après avoir visité Bayonne qui est très gentil et déjeuné j’ai pris le tramway qui en 25 min mène à Biarritz où je viens d’arriver.
Je vous embrasse tous.
Bien Affectueusement.

Envoyée à :
Monsieur et Madame Delan (?)
Rue de la fosse aux moines
Montmorency 

10 Commentaires
  • mzelle-fraise
    Posted at 09:33h, 27 mai Répondre

    Joli billet, jolie réflexion ! Et puis, c’est bien de se bousculer parfois 🙂

  • argone
    Posted at 09:34h, 27 mai Répondre

    Exercice parfois difficile en effet de photographier une ville qu’on connaît bien, ou qu’on croit connaître. Photographier les gens j’aime bien mais en France c’est vraiment compliqué, hélas. Merci pour cette promenade bien iodée !

  • Marie
    Posted at 10:32h, 27 mai Répondre

    Je trouve tes photos très bien! C’est vrai que c’est très difficile je trouve d’être inspiré par ce qu’on a l’habitude de voir. Mais au final c’est au beau défi qui je pense fait bcp progresser! Je vais essayer de faire pareil 😉

  • Céline
    Posted at 14:10h, 27 mai Répondre

    Une très belle balade, bravo pour les photos, je les trouve magnifiques!
    Céline Articles récents..[Concours] Le joyeux bazar a 2 ans !My Profile

  • Curiosités à NY
    Posted at 17:16h, 27 mai Répondre

    Moi aussi quand je veux me bousculer un peu j’accroche la focale fixe 50mm. C’est pas toujours facile à utiliser surtout en ville mais ca donne toujours de beaux resultats et ca demande un peu de reflexion ! tes photos sont très belles 🙂
    Curiosités à NY Articles récents..Visite du Brooklyn Navy YardMy Profile

  • Vagabondanse
    Posted at 20:01h, 28 mai Répondre

    wow ! Je suis touchée du compliment, mais vraiment, la blogosphère est bien assez grande comme cela pour que chacun y ait sa place 😉
    La street photographie est une pratique tout aussi épineuse. Ayant jusque là préféré le paysage, j’essaie de m’y frotter dès que l’occasion se présente, mais c’est vrai que c’est délicat, demande du temps, du recul et une pointe d’audace.
    Le principal, comme tu le soulignes c’est de prendre du plaisir, ca ne fait pas de mal de bousculer ses habitudes, de se chambouler soi même et de sortir des sentiers tracés. Qu’importe le résultat, bon ou mauvais, il y aura toujours de quoi en tiré des leçons, retenir et apprendre 🙂

  • Pascal
    Posted at 16:40h, 01 juin Répondre

    Je me reconnais un peu dans ton texte. J’ai eu un peu le même problème avec mon île Réunion dont je suis originaire. Je suis né là-bas et y ai vécu jusqu’à mes 15 ans! Depuis, à chaque fois que j’y retourne, je ramène très peu d’images. A quoi ça sert, tout est imprimé sur la rétine et j’ai juste à fermer les yeux pour voir défiler les souvenirs! J’ai eu l’occasion de partir un mois là-bas en octobre dernier. Je me suis forcé à faire des mini reportages d’endroits que j’aime et variés. Des débuts difficiles et laborieux. J’ai résolu le problème en troquant le zoom pour un fixe. Je ne sais pas comment mais tout est devenu évident… Et j’ai fini par raconter une multitude d’histoires au travers de mes regards… Comme tu le dis si bien à la fin, c’est en déshabillant du regard ce que l’on connait le mieux que l’on arrive à partager son intimité.

  • Maïder
    Posted at 18:18h, 04 juin Répondre

    Ce n’est pas Biarritz que je dois voir d’un autre regard mais le pays basque en entier ! Et puis la destination est tellement personnelle, quasi de l’ordre de l’intime qu’il m’est compliqué d’aborder le sujet… enfin c’est l’histoire d’un déclic je suppose 😉 Bref les photos sont très chouettes et il y a de bien jolis coins à Biarritz pas forcément bling-bling (malgré son surnom de Petit Paris chez les luziens) !
    Maïder Articles récents..Mes bonnes adresses à PortoMy Profile

    • retourdumonde
      Posted at 18:34h, 04 juin Répondre

      Je pense en effet que Biarritz mérite d’être fouiller, décortiquer pour mieux la comprendre. Dans les hauteurs j’avais croisé des coins sympas, mais je n’ai jamais pris le temps de m’y perdre.
      Pour ce qui est du Pays Basque, même si c’est pour une raison différente, c’est pareil, c’est personnel pour pleins de raisons que j’essayerais un jour (proche) de coucher sur le papier. Ce coin fait partie de moi, suffit juste de trouver le bon angle. Mais parlez de cette région en y posant mes tripes sur la table c’est ma façon à moi de tenter de faire porter un autre regard sur ce coin, ce deuxième « chez moi ». Merci d’avoir rattrapé le retard de lecture 😉 et Welcome Home !

      W.

  • Roman
    Posted at 10:10h, 19 mai Répondre

    Toller Blogbeitrag! Äußerst ungewöhnlich, den Strand von Biarritz mit so wenig Leuten zu sehen. Als ich da war, war es rappeldicke voll!

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