Grand soleil sur Reykjavik et grasse matinée. Cette phrase résume assez bien la journée dans la capitale islandaise.
Levés un peu plus tard que d’habitude, on prend notre temps au Bus Hostel, dans le grand lobby, en regardant sous cloche le dernier Cheesburger jamais vendu en Islande. En effet McDonald’s a quitté l’île en 2009.
Le Bus Hostel, c’est l’auberge de jeunesse, façon auberge espagnole, mais version vintage chic. Des vieux fauteuils club chinés on ne sait où. Une platine vinyle et quelques galettes en libre service.
Une déco à faire pâlir un magazine de déco, une communication visuelle originale. Bref c’est sans doute l’endroit le moins cher pour se loger, mais surtout le plus convivial.
En attendant que Sophie se prépare et prenne son temps (après tout c’est son jour de congé), on décide de tracer au Kolaportið Flea Market, ouvert seulement le week-end. Situé dans un bâtiment en béton le long du port, c’est un savoureux mélange entre brocante, fripes et nourriture locale.
On y trouve aussi les grands classiques des vide greniers, des vieilles cartes postales (on craquera d’ailleurs pour 3-4), des vieilles cartes, des vieux bouquins.
Les islandais ont pris la récession en pleine tête, du coup le marché de la seconde main a fait un boom croissant, les vêtements, les livres, les jouets se revendent ou s’échangent de main en main.
Ce lieu est un joyeux bordel, et on s’amuse à en arpenter les allées, entre vendeurs asiatiques, poissonniers, bouquinistes, où d’ailleurs on peut trouver Lukku Laki, Lucky Luke ou encore Palli Og Toggi soit Quick et Flupke.
On déjeune rapidement avant d’attaquer le musée du phallus de Reykjavik. Je vous l’accorde, la transition est plutôt rude. Nous n’avons peut-être pas eu notre lot de curiosités culinaires islandaises, alors on se rattrape avec le « culturel » bizarre.
Le musée du phallus est plutôt particulier, la ligne de son fondateur est claire : c’est une collection de phallus de mammifères existants en Islande. Aux spécimens les plus étonnants comme les phallus de cachalot et d’orque sont accolés des objets plus « kitsch » et c’est peut-être en cela que ce musée semble partir dans tous les sens : certains documents historiques sont bien expliqués et renseignés, mais à côté il va y avoir une blague potache sur un mur déjà bien chargé.
La collection se justifie en soi, mais mérite d’être plus expliquée. Certains objets mériteraient un point historique. A part cela, c’est intéressant. Seul point important à préciser : n’y allez pas si le formol vous met mal à l’aise !
On s’embarque pour un petit tour dans la ville, cette fois-ci de jour, flânant entre les maisons, retrouvant un peu l’atmosphère des petits villages que nous avons traversé durant notre voyage, mais en plus grand.
Dans le ciel, les nuages s’effilent comme des coups de pinceaux que l’on aurait tracés de manière totalement aléatoire. Les maisons traditionnelles côtoient celles en béton, accolées à d’autres de couleur fluo.
Nos pas nous mènent de nouveau au pied de l’Hallgrímskirkja, l’église emblématique de Reykjavik.
Son architecte est Guðjón Samúelsson et sa construction s’est étalée de 1945 à 1986. Jusqu’il y a peu de temps, 2008, c’était le bâtiment le plus haut de la ville.
Au pied de l’église, trône la statue de Leifur Eiríksson, le fils d’Erik le Rouge. La boucle est bouclée. Désormais nous comprenons mieux son importance aux yeux des islandais.
Nous redescendons la rue qui part en face de l’église. Il est 17h passées, les boutiques ferment petit à petit. On avait repéré un magasin de photo lors de notre premier passage.
On aimerait choisir une photo pour offrir, sauf que voilà le magasin est fermé. Pas de souci, un numéro de téléphone est collé sur la porte, il suffit d’appeler et le proprio rapplique en moins de 5 minutes. Et c’est ce qu’on fait.
En moins de 2 minutes, Ari Sigvaldason arrive et nous ouvre la porte. On dévore des yeux le travail de ce passionné de photos, et d’appareils argentiques. Sa boutique est un vrai petit bijou, tenu par un dingue de la pellicule. On discute avec lui, et il nous explique que sa boutique lui sert de salle d’exposition. Les prix sont abordables, le patron est super gentil, bref c’est le must see pour tout amateur de photos. Et d’ailleurs nous craquerons tous pour un tirage.
On continue nos déambulations, dans cette ville jeune, et on tombe au fond d’une petite ruelle sur une boutique de design finlandais. Bon ce n’est pas typique, mais bon ça nous rappelle notre pays de cœur.
Il faut le savoir, et on le comprend que mieux après avoir vu Akureyri, l’Islande, c’est un peu la bonne place pour le street art. Les jeunes islandais démontrent un certain talent dans le domaine, et ce n’est pas pour nous déplaire.
Moi j’ai un petit plaisir quand je vais à l’étranger, c’est de trouver un magasin de vinyle, j’ai fait quelques repérages avant de partir, et du coup on file du côté de Lucky Records. Un grand espace, des disques partout et bien rangés, des canapés et du café. Bref vous êtes direct dans l’ambiance pour écouter du son confortablement. On y passe pas loin d’une heure.
J’ai la tête dans les bacs de jazz et de blues, Sophie hésite sur une compil de tubes islandais de 1993 et un album au feeling, et Cécile fait défiler les sons sur le jukebox. Ce magasin est juste un pur plaisir.
On reprend la voiture. Pas très loin de l’hôtel, il y a le Perlan. Que ce soit dès notre arrivée dans le bus de l’aéroport, ou bien à l’auberge de jeunesse, tout le monde nous conseille de monter voir ces anciens réservoirs géothermaux, ne serait ce que pour admirer la vue.
Alors quitte à être là, autant monter sur cette colline Öskjuhlíð pour admirer la vue.
A peine rentrés à l’intérieur, qu’un monsieur en costume nous accueille nous demandant poliment si nous nous rendons au restaurant ou au panorama. Car oui depuis 1991, date à laquelle les réservoirs ont été vidés, un restaurant panoramique et tournant a été installé dans un dôme à son sommet.
Notre budget ne nous permet juste d’admirer la vue panoramique sur Reykjavik. Alors on fait le tour plusieurs fois, en discutant de tout et de rien, admirant le soleil déjà couché, les nuages qui s’étirent. Entre deux avions qui atterrissent sur l’aéroport domestique de la ville, on guette tout de même le ciel pour voir si les aurores annoncées ont commencé à pointer leur nez. Mais non toujours rien. Allez on refait un dernier tour, juste pour dire.
On rentre à l’hôtel, on vide le stock de pâtes emmené avec nous depuis la France. Alors on se fait une petite tambouille pâtes bolognaise tout en surveillant d’un œil les prévisions d’aurores qui viennent tout juste de monter à 4. Ca sent bon pour ce soir !
On voit que ça s’active, alors on mange en vitesse. Sophie nous demande « Non mais vous vous levez tôt demain, si vous ne voulez pas bouger je comprend ». Ah oui une petite précision : demain nous devons être debouts à 3h30 du matin pour attendre le bus qui nous emmènera à l’aéroport.
Entre dormir et voir des aurores, le choix est très vite fait. On remballe tout, on ne laisse dehors que l’essentiel : appareil photo, trépied, sac. On fait la valise en vitesse, on laisse l’excédent de nourriture dans la cuisine, ça servira aux prochains touristes de passage et on grimpe dans la voiture.
Pas question de retourner au même endroit qu’hier, alors on prend la direction de Hvalfjörður, le fjord de la baie des baleines, juste avant Akranes. Pendant que je conduis et que nous nous éloignons de la ville, Cécile et Sophie scrute par la fenêtre « Des aurores, elles sont énormes ». J’en viendrais presque à être frustré de ne rien voir. Ni une, ni deux, j’aperçois un petit chemin qui mène à un champ au pied des montagnes.
Je sors et là c’est la grosse claque. L’aurore est forte mais surtout immense, elle remplit tout le ciel au dessus de la baie.
Ca part d’un peu partout, mais globalement toujours de cet axe est/ouest, derrière les montagnes. Elles semblent tomber en ligne droite comme des comètes ou une chute de météorite.
De l’autre côté, elles viennent mourrir aussi dans la baie dans une longue trainée en rideau.
Le spot est beau, nous seuls, dans quelques heures à peine on décolle d’Islande, mais c’est de loin la dernière de nos pensées.
Au bout d’un moment, nous décidons quand même de changer de spot, alors on profite d’une petite accalmie pour s’avancer.
On trouve un endroit un peu flippant au croisement d’un chemin de ferme. On tente bien de s’avancer sur les berges de la baie, mais une voiture à moitié cachée dans les buissons nous file des frissons, alors on remonte à grand pas le chemin, on saute dans la voiture et on bouge de nouveau pour un autre endroit.
Juste après un pont qui traverse la baie gelée, on se pose. La vue est là aussi splendide. Nous sommes à un endroit qui donne l’impression d’être au cul du fjord. Face à nous les lumières de Reykjavik se reflètent dans les nuages, et dans les mini icebergs qui reposent dans la baie.
Derrière nous, au-delà de la montagne les aurores se déchaînent, se parant même de rouge, chose qui est plus rare. Le ciel est magnifiquement étoilé, on discerne difficilement la voie lactée mais tout est là.
On se pose au milieu du pont, on discute de tout et de rien, du probable futur voyage de Sophie au Groenland, de l’expatriation, de tour du monde, on lui donne des nouvelles des amis… En somme on refait le monde au milieu d’un fjord sous les aurores boréales.
Et puis petit à petit les aurores se font plus calmes, moins vives, fatiguées par le spectacle qu’elles nous ont offert. Et nous aussi on fatigue, les paupières sont lourdes, la tête pleine d’images, alors on reprend le chemin du retour dans la quiétude et le silence, souvenir d’une belle soirée.
Arrivés à l’hôtel, on remonte à pas feutrés dans la cuisine commune, nous on prend un café, car il va falloir tenir. Il est 2h du matin, nous devons être debouts à 3h30, autant dire que ça ne sert à rien de se coucher.
Alors on dit au revoir à Sophie, la laissant remonter dans sa chambre et attaquer sa nuit. Nous, nous nous posons dehors en se disant que la fraicheur de la nuit nous tiendra sans doute éveillés, après un énième café.
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