Le dernier jour, dans le froid, le brouillard…et les canards
Le dernier jour, dans le froid, le brouillard…et les canards
Dernier jour et dernière nuit que nous venons de passer dans le van. La nuit a été très froide, William n’a pas très bien dormi mais se rattrapera ce soir.
On se lève tôt, car il faut boucler les valises. La surprise de ce matin, qui rattrape la longue recherche d’hier soir et la nuit, c’est la chape de brouillard qui est tombée pendant la nuit, doucement éclairée par le lever du jour.
Je m’échappe discrètement, laissant Cécile dans le van pour ranger, rassembler (oui bon d’accord, mais on va se gêner à deux ! ^^), et sors immortaliser les paysages mystiques dignes des photos de Mikko Lagerstedt.
Je me balade sur la route, armé du Nikon et du Yashica je grimpe sur les rochers m’approche de la plage, immortalise au noir & blanc ces trois rondins qui émergent d’une eau quasiment plate et lisse.
On quitte notre petit endroit pour rebrousser chemin jusqu’à Kinloch Rannoch : le brouillard donne à la route un côté mystique et cotonneux.
Lorsque nous arrivons dans la vallée de Schiehallion, le soleil perce derrière le brouillard et c’est en descendant de la voiture que l’on constate que la nuit a vraiment été fraîche : une légère couche de gel recouvre la bruyère et la route est glissante.
Le froid glace les joues, mais le paysage est à tomber. Cette route en lacets, ces quelques arbres, ce silence : ce paysage rappelle à William le Pays Basque.
Pour moi, un peu de gel, ce froid piquant sous le soleil, ça me rappelle tous nos voyages d’hiver. Le temps de prendre quelques photos, le brouillard se dissipe doucement.
William s’habitue à la conduite dans le brouillard, mais les faisans qui traversent la route inopinément continuent de nous surprendre.
On se paume sur la route B846, petit chemin de rien qui serpente au milieu de vallées et de forêts. La route s’embrume de nouveau et donne à voir deux aspects. Dans notre dos, pas de soleil, les tons sont gris, froids, la route à des allures effrayantes à se perdre comme ça dans un paysage froid.
De l’autre côté, face à nous, le soleil tente de percer l’épaisse couche. Les tons sont chauds, jaune, orange, faisant ressortir la beauté de la flore. D’effrayante, la route devient attirante.
Ici aussi la flore est recouverte d’une couche de givre. Le chemin s’étire sans que l’on ne croise personne, hormis quelques granges abandonnées, dignes d’un décor de cinéma.
A la fin de cette route, alors que le brouillard s’était dissipé, nous replongeons dans le coton en arrivant au Castle Menzie, un château du 16e siècle, récupéré au 20e siècle par la Société du Clan Menzie qui le restaure depuis.
Il semble même qu’il soit possible de le louer et d’y dormir, mais bon pas de chance pour nous il est fermé. Alors je traine mes pieds autour, l’admirant sous toutes ses formes, m’imaginant la vie que ça devait être quand Bonnie Prince Charlie y passa deux jours, entre deux batailles.
La brume l’absorbe. Dehors, derrière la château du linge sèche dans une température pas très éloignée du 0 et un taux d’humidité à faire affoler un hygromètre.
Tandis que sa silhouette se fait de nouveau happer par le brouillard, nous laissons la château dans notre dos, avant de filer vers Aberfeldy et la route de Glen Cohill.
Après des virages et forêts, nous arrivons à un point de vue, d’où l’on aperçoit la vallée s’étendre à perte de vue et se faire manger par des nuages bas.
Les villages d’Aberfeldy et Pitlochry ne sont pas visibles, seule la vue sur les montagnes des Corn Maig, Meali Tairnmeachan le sont. Le temps reste vraiment frais, je retrouve la sensation de ne plus sentir le bout de mes pieds…
Le temps s’est découvert, faisant ressortir les couleurs de ce paysage devenu hivernal : vert foncé des sapins et jaune orangé de la bruyère. Ce paysage de la Glen Almond avec ses rivières, arbres et larges routes donnent envie de traverser l’Atlantique pour des paysages similaires au Canada et aux États-Unis.
L’arrivée sur Crieff surprend : alors que nous sommes habitués aux petits villages, dont certains ont vraiment 3 maisons, Crieff est un bourg, dont les rues sont animées par les habitants en costume, Poppy en boutonnière qui symbolise l’hommage pour le Remembrance Day.
On traverse rapidement pour longer la rivière Earn et se diriger vers le Loch Lomond and The Trossachs National Park.
A l’entrée du Loch Earn, nous arrivons à St Fillans, où William manque de peu de faire d’un canard notre déjeuner.
Au bord du lac, il y a en effet une horde de canards et de canes qui se précipitent vers le van lorsque nous nous arrêtons.
Un couple d’anglais, arrivés après nous, semble être plus intéressant à leurs yeux. Préparés et équipés ils donnent allègrement à manger aux palmipèdes.
On longe le Loch Earn, il commence à se faire faim, mais en guise d’apéritif, nous avons le loch, éclairé par un beau soleil avec quelques nuages de brouillard sur les flancs du Ben Vorlich.
Nous parcourons quelques miles et croisons quelques aires pour déjeuner, toutes remplies de voitures. Nous nous rendons compte que nous sommes dimanche et que la randonnée est apparemment une occupation dominicale assez prisée pour les Écossais.
Certains parkings payants du parc national des Trossachs sont aussi réservés aux camping-cars. Disposant de places au sec (gravier), d’un point d’eau et de parfois une petite épicerie.
On jette notre dévolu sur un parking (provisoire) au pied de Duke’s Pass. Il nous faut déjeuner, mais surtout nettoyer le van.
Alors qu’on a croisé beaucoup de parkings sur la première partie de la route qui longe le Loch Venachar, sur le Loch Achray c’est une toute autre paire de manches. Du parking part une randonnée qui monte au Benvane.
Le parking, en ce dimanche est blindé. Beaucoup semblent avoir profité du week-end pour se promener le long des multiples chemins qu’offre le parc des Trossachs.
Nos derniers sandwiches avalés sous le regard d’un rouge-gorge loin d’être peureux, nous attaquons le ménage du sol au placard histoire de rendre le van propre. Cette opération nous prend une bonne grosse demi-heure. On est toujours bons sur le timing.
La suite de la route est loin d’être extraordinaire mais reste toutefois sympathique alternant vue au loin des lochs, forêt de sapins aux couleurs de la large palette que propose l’automne.
L’esprit est ailleurs, une bonne partie de la route se fait dans le silence. C’est la fin de ce voyage et c’est toujours une étape à franchir que chacun de nous deux surpasse différemment.
On prend quand même notre temps, repoussant le moment fatidique du retour sur Glasgow. Alors on serpente. Tout d’abord en poussant sur Drymen puis en continuant jusqu’à Balmaha.
Balmaha a des allures de station balnéaire, le long du Loch Lomond. Marina, lodge de vacances, Visitor Center des Trossachs. Une sorte de point de rencontre pour les habitants (fortunés) de Glasgow, des touristes et des curieux.
On assiste au ballet des bateaux qui sortent du garage, prêts à mouiller dans le loch.
Nos pas nous mènent en plein cœur du parking à bateau, d’où on peut observer une partie du loch. Au fond un couple de petit vieux, prend le peu de soleil sur un petit bateau, sur le côté et derrière nous, les garages, portes ouvertes cachent des petites coques de noix, prêtes à voguer sur les eaux calmes.
Un dernier chocolat chaud, on observe le ballet dominical, on fait un dernier rangement et ce que l’on repoussait doit arriver, nous reprenons la route vers Glasgow.
Toujours en silence, la boule au ventre, l’angoisse de retrouver la ville, voilà un peu tous les sentiments par lesquels nous passons. Par chance et par souvenir, nous ne nous perdons même pas dans la tentaculaire banlieue de Glasgow.
Longeant l’Hydro, la salle de concert moderne qui accueille ce soir les MTV Europe Music Awards, nous arrivons en avance au siège d’Atlas à qui nous avons loué le Camper-Van.
Nous appelons Richard, le patron d’Atlas, et l’attendons dans cette rue industrielle, et sous l’œil de l’immense tour de brique d’une ancienne usine de farine. En 10 minutes, le patron arrive pour faire le check-out, le tour du véhicule, extérieur comme intérieur, tout en demandant comment cela s’est passé.
L’occasion d’avoir le verdict sur le nombre de kilomètres de ce voyage : 1 703 kilomètres.
Sur le trajet jusqu’à l’hôtel nous discutons tourisme avec Richard, lui donnant quelques conseils sur les coins à voir en France, lui décrivant le Pays Basque comme une autre Écosse. Arrivés à l’hôtel, situé à 50 mètres de là où nous sommes sortis lors de notre arrivée, nous saluons et remercions Richard chaleureusement.
Pas fâché de retrouver un vrai lit, de pouvoir se laver et de passer une nuit au chaud. Avec en prime pour moi, une vue directe sur les pistes et les avions.
On profite de la proximité avec l’aéroport pour faire quelques derniers achats, de s’imprégner de cette atmosphère de départ ou d’arrivée. On passe le diner au restaurant de l’hôtel, pour déguster un hamburger d’Angus pas vraiment fameux. Et nous remontons dans notre chambre avec vue.
J’ai toujours voulu dormir dans un hôtel d’aéroport, pour son ambiance de transit, pour ces gens qui se croisent, qui partent et qui arrivent. Mais aussi pour ces lumières si particulières, ses connotations, ses références.
Bref un moyen de voir notre retour à Paris depuis la fenêtre mais aussi de rêver et de s’imaginer la prochaine destination, tout en tournant la page de ce road trip en Écosse.
Pas de commentaires